Conseils du Saint Curé d’Ars pour résister aux tentations

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1. Comprendre la Tentation

Tout le monde a des tentations et les chrétiens bien plus que les autres car le démon souhaite les faire tomber. Il n’a pas besoin de tourmenter les païens puisqu’ils sont déjà dans ses filets.
Le Saint Curé d’Ars nous confirme cela dans cette homélie très instructive :

Notre divin Sauveur, ayant été notre modèle en tout, a voulu l’être aussi dans la tentation. C’est pour cela qu’il s’est laissé conduire au désert.
Comme le bon soldat n’a pas peur du combat, de même le bon chrétien ne doit pas avoir peur de la tentation. Tous les soldats sont bons en garnison : c’est sur le champ de bataille que l’on fait la différence des courageux et des lâches.
La plus grande des tentations est de n’en point avoir. On peut presque dire qu’on est heureux d’avoir des tentations : c’est le moment de la récolte spirituelle où nous amassons pour le ciel. C’est comme au temps de la moisson, on se lève de grand matin, on se donne beaucoup de peine ; mais on ne se plaint pas, parce qu’on ramasse.
Le démon ne tente que les âmes qui veulent sortir du péché et celles qui sont en état de grâce. Les autres sont à lui, il n’a pas besoin de les tenter.

2. Sagesse des Saints face aux Luttes Spirituelles

Un saint, passant un jour devant un couvent, vit une quantité de démons qui tourmentaient les religieux sans venir à bout de les séduire. Il passa ensuite devant une ville et en vit un seul assis, qui se croisait les bras et faisait marcher toute la population. Alors le saint lui demanda comment il était seul pour une grande ville, pendant qu’ils étaient un si grand nombre pour tourmenter une poignée de religieux. Le démon lui répondit qu’il suffisait bien pour la ville, parce que ceux qui étaient enclins à la haine, à l’impureté, à l’ivrognerie, il les prenait par là, et c’était d’abord fait ; tandis qu’avec les religieux, c’était plus difficile. L’armée de démons occupés à les tenter y perdaient leur temps et leur peine ; ils n’en pouvaient rien tirer. Aussi attendaient-ils qu’il en vînt d’autres qui s’ennuyassent de l’austérité de la règle.
Dans un monastère, un des frères vit pendant le saint sacrifice, des démons qui rôdaient autour de ces bons religieux. Il en vit un surtout qui piétinait sur la tête d’un moine, et un autre qui avançait et reculait tour à tour. Après la messe, ce frère demanda aux deux religieux ce qui les avait occupés pendant l’office. Le premier dit qu’il avait pensé à un plancher qu’il voulait faire dans le couvent, et le second, que le démon était venu l’attaquer, mais qu’il avait toujours tâché de le repousser. C’est ce que font tous les bons chrétiens. Aussi la tentation est pour eux une source de mérites.
Les tentations les plus ordinaires sont l’orgueil et l’impureté. Un des moyens par lesquels on y résiste le mieux est une vie active pour la gloire de Dieu. Bien des gens se livrent à la mollesse et à l’oisiveté : dès lors il n’est pas étonnant que le démon leur ait le pied dessus.
Un religieux se plaignait à son supérieur d’être violemment tenté. Le supérieur ordonna au jardinier et au cuisinier de l’appeler à tout moment ; quelque temps après, il lui demanda comment il allait : « Ah ! mon Père, lui dit-il, je n’ai plus le temps d’être tenté. »
Si nous étions bien pénétrés de la sainte présence de Dieu, il nous serait très facile de résister à l’ennemi. Avec cette pensée : Dieu te voit ! nous ne pécherions jamais.
Il y avait une fois une bonne sainte, — je crois bien que c’est sainte Thérèse, — qui se plaignait à Notre-Seigneur après la tentation, et lui disait : « Où étiez-vous donc, mon Jésus tout aimable, pendant cette horrible tempête ? » Notre-Seigneur lui répondit : « J’étais au milieu de ton cœur, qui prenais plaisir à te voir combattre. »

3. Résister à la Tentation : Le Rôle des Démons

Au moment de la tentation, il faut renouveler fermement les promesses de son baptême… Tenez, écoutez bien ça. Lorsque vous êtes tentés, offrez au bon Dieu le mérite de cette tentation pour obtenir la vertu opposée. Si vous êtes tentés d’orgueil, offrez la tentation pour obtenir l’humilité ; de pensées déshonnêtes, pour obtenir la pureté ; si c’est contre votre prochain, la charité. Offrez aussi la tentation pour demander la conversion des pécheurs : ça dépite le démon et le fait fuir, parce que la tentation se tourne contre lui. Allez ! après cela il vous laissera bien tranquilles.
Un chrétien doit toujours être prêt au combat. Comme en temps de guerre il y a toujours des sentinelles placées çà et là, pour voir si l’ennemi approche ; de même, nous devons toujours être sur nos gardes, pour voir si l’ennemi ne nous tend pas des pièges, et s’il ne vient pas nous surprendre…

De deux choses l’une : ou un chrétien domine ses penchants, ou ses penchants le dominent ; il n’y a pas de milieu. C’est comme deux hommes qui se prennent au collet à qui sera le plus fort et terrassera l’autre.
Il y en a presque toujours un qui finit par mettre l’autre à bas, et quand il le tient par terre, le pied sur la gorge, il s’en embarrasse bien ! Il est le maître. De même, avec nos penchants la lutte est rarement égale : ou nos penchants nous mènent, ou nous menons nos penchants.
Mes frères, que c’est triste de se laisser mener par ses penchants ! Un chrétien est noble ; il doit comme un grand seigneur commander à ses vassaux. Nos vassaux sont nos penchants. On demandait à un berger qui il était. Il répondit « qu’il était roi. — Sur qui régnez-vous ? — Sur mes sujets ? — Et quels sont vos sujets ? — Mes penchants. » Ce berger avait bien raison de dire qu’il était roi.

Nous sommes en ce monde comme un vaisseau sur la mer. Qu’est-ce qui produit les vagues ? C’est l’orage. En ce monde le vent souffle toujours. Les passions soulèvent la tempête dans notre âme : ce sont ces combats qui nous mériteront le ciel.
Il ne faut pas croire qu’il y ait quelque lieu sur la terre où nous puissions échapper à cette guerre. Nous trouverons le démon partout ; et partout il cherchera à nous ravir le ciel. Mais partout et toujours nous pouvons être vainqueurs. Ce n’est pas comme dans les autres combats. Entre deux partis il y a toujours un vaincu : là, si nous voulons, avec la grâce de Dieu, qui ne nous est jamais refusée, nous pouvons toujours triompher.
Lorsque nous croyons que tout est perdu, nous n’avons qu’à crier : Seigneur, sauvez-nous, nous périssons ! Car Notre-Seigneur est là, tout à côté de nous, qui nous regarde avec complaisance, nous sourit et nous dit : « Vraiment tu m’aimes ; je reconnais que tu m’aimes. » En effet, c’est dans les combats contre l’enfer, et dans la résistance aux tentations, que nous prouvons à Dieu notre amour.
Qu’il y a d’âmes inconnues dans le monde qu’on verra riches un jour de toutes ces victoires de chaque instant ! C’est à ces âmes que le bon Dieu dira : Venez, les bénis de mon Père… entrez dans la joie de votre Maître…
Notre ange gardien est toujours là, à côté de nous, la plume à la main, pour écrire nos victoires. Il faut nous dire, tous les matins : « Allons, mon âme, travaillons à acquérir le ciel. Ce soir nos combats seront finis. » Le soir : « Demain, mon âme, toutes les peines de la vie seront peut-être passées pour toi… »
Nous n’avons pas encore souffert comme les martyrs. Demandez-leur s’ils sont fâchés maintenant… Le bon Dieu ne nous en demande pas tant… Il y en a qu’un seul mot renverse. Une petite humiliation fait chavirer la barque… Courage ! mes frères, courage ! Quand viendra le dernier jour, vous direz : « Heureux combats qui m’ont valu le ciel ! »
Combattons donc généreusement. Une fois que le démon verra qu’il ne peut rien sur nous, il nous laissera la paix. Voilà comment il en use ordinairement avec les pécheurs qui reviennent à Dieu : il leur laisse goûter les douceurs des premiers moments de leur conversion, parce qu’il sait bien qu’il ne gagnerait rien ; ils sont trop fervents. Il attend quelques mois que leur ardeur soit passée ; puis il commence à leur faire négliger les prières, les sacrements ; il les attaque par diverses tentations ; puis viennent les combats : c’est bien alors qu’il faut demander la force et ne pas se laisser abattre. Il y en a qui sont tellement faibles que, lorsqu’ils sont un peu tentés, ils se laissent aller comme du papier mou. Si l’on marchait toujours en avant comme les bons soldats, quand viendrait la guerre ou la tentation, on élèverait son cœur à Dieu et on reprendrait courage. Mais on demeure en arrière, on dit : « Pourvu que je me sauve, c’est tout ce qu’il m’en faut. Je ne veux pas être un saint. »
Si vous n’êtes pas un saint, vous serez un réprouvé ; il n’y a pas de milieu ; il faut être l’un ou l’autre : prenez-y garde. Tous ceux qui possèderont le ciel un jour seront saints. Les âmes du purgatoire le sont, puisqu’elles sont les amies du bon Dieu. Travaillons, mes enfants ; un jour venant, nous trouverons que nous n’avons rien fait de trop pour gagner le ciel.